Comment fonctionne un engin mu par le Vent
le principe de la grand-voile
 INTRODUCTION
 
L'ensemble des forces crées par le vent sont utilisées depuis très longtemps à des fins propulsives. Dès la préhistoire, on remarque la présence de voiles sur les embarcations, et cette utilisation de la poussée vélique n'a fait que croître jusqu'à nos jours.
A l'heure actuelle la voile est presque uniquement une source de loisir et de compétition. Une évolution remarquable du matériel est à noter au cours des siècles, puisque l'on passe des galères antiques à d'énormes vaisseaux de commerce ou de guerre, jusqu'à de somptueux bateaux de course que nous pouvons admirer tout au long de nos côtes. Cela s'est traduit par des modifications architecturales des formes des carènes ainsi que des gréements.
Au départ, le vent n'était utilisé que pour pousser les embarcations jusqu'à l'allure du largue, alors qu'aujourd'hui il y a possibilité de remonter vers l'axe du vent jusqu'à des angles proches de 25° pour les voiles, et donc, par une utilisation plus rentable de celles-ci.
 
Avant toute chose, il est nécessaire de préciser quelques éléments de base indispensables à la compréhension du fonctionnement d'une voile : le déplacement du voilier est dû à l'action du vent sur la voile.
En effet, lorsque le vent (que l'on considère comme des molécules d'air) arrive sur une voile, la première partie qu'il touche est le bord d'attaque, les molécules d'air le considèrent comme un obstacle, et cherchent à le contourner. Cependant ce contour ne se fait pas de manière identique de part et d'autre de la voile. Sur la face de la voile, en contact direct avec l'arrivée du flux d'air ou intrados, il y a un surcroît d'espace de par la forme de la voile, ce qui provoque un ralentissement des filets d'air par rapport au flux général et donc une augmentation de pression. A l'inverse sur la face de la voile qui n'est pas en contact direct avec les filets d'air, il y a une diminution d'espace de par la convexité de la voile, ce qui provoque un champ dépressionnaire par accélération des filets d'air, qui attire la voile.
La résultante de l'ensemble des forces de succion est appelée force aérodynamique ou poussée vélique, elle est appliquée au centre vélique. Afin de toujours présenter une poussée vélique optimale, quelque soit le type de vent, et sa position par rapport au vent, la voile doit pouvoir être réglée à l'aide de l'ensemble des paramètres extérieurs. Cependant la voile présente dès sa conception des caractéristiques biens précises dues à la répartition des volumes.
 
 
LES VOLUMES AU CREUX D'UNE VOILE
 
 
Les positions et rôles du creux :
 
La restitution de la poussée vélique impliquée par le vent dans la voile se fait de manière plus ou moins correcte en fonction de la forme de cette dernière. En effet il est possible d'observer sur toute la hauteur et la largeur de la voile, une certaine répartition des volumes, On parlera alors de creux, valeur exprimée sous forme de fraction ou de pourcentage.
Creux = Flèche(a)/Corde(d)
Le creux n'est pas une variable fixe sur toute la voile, la position du creux, ainsi que sa valeur ont tendance à se déplacer. Cependant, il existe des basses théoriques de distribution qui doivent être respectées.
 
La distribution horizontale
 
Si l'on effectue la section d'une voile par un plan horizontal, on doit pouvoir observer une quantité de creux maximale (défini par la distance d), ainsi que la répartition du creux d'avant en arrière.
 
La distribution verticale
 
Cela permet de repérer avec plus de précision l'emplacement de la profondeur maximale (a) ainsi que la symétrie de la courbure par rapport à la profondeur maximale (voir schéma) Les conséquences des différentes distributions :

Il est impératif de noter que la répartition horizontale de creux (voir schéma) a des conséquences de trois ordres.
 

l'orientation de la poussée vélique
 
Par exemple pour un angle d'incidence de 20 à 25° par rapport au vent, avec une voile dont le creux maximum sera situé sur le tiers avant, la poussée vélique sera orientée vers l'avant, et non perpendiculairement à la voile dans le cas d'un creux centré.
 
 
Le point d'application de la poussée vélique se déplace en même temps que le creux maximum. Si celui-ci recule, le point d'application de la poussée vélique reculera également.
 
 
 Cette variation du point d'application de la poussée vélique avec le déplacement de la position du creux maximum provoquera un décalage sur l'axe longitudinal par rapport au point d'application de l'ensemble des forces que subit la coque (force hydrodynamique). Cela aura pour effet de modifier l'équilibre de route du voilier. Si le creux se déplace sur l'arrière de la voile, le bateau aura tendance à remonter sur l'axe du vent ou loffer. Au contraire, si le creux se déplace vers l'avant, le bateau montrera une tendance à s'écarter de l'axe du vent ou abattre.
 
 La régularité des profils
 
L'emplacement du creux maximal conditionne la forme des volumes avants et arrières, ceci pour répondre aux exigences de qualité de l'écoulement. Cependant toutes les combinaisons ne sont pas envisageables.
 
 Si le creux maximum est dans le tiers avant, cela provoquera une attaque plus pleine du bord d'attaque, et donc, une zone de décrochage des filets d'air plus proche du bord d'attaque, ainsi qu'une plus grande tolérance par rapport aux variations de l'angle d'incidence.
 
 

 Si le creux est maximum et se positionne au milieu de la voile, cela provoquera une attaque plus fine du bord d'attaque, et donc un allongement de la zone d'écoulement des filets d'air non perturbés.
 

 
 
Il est important de préciser que la qualité du rendement d'une voile est absolument inséparable de la qualité de l'écoulement des filets d'air le long de cette dernière. Les différences de vitesse d'écoulement de part et d'autre de la voile n'ont pas d'autres origines que cette qualité d'écoulement. Enfin les différentes répartitions des creux sur toute la hauteur de la voile sont à l'origine du phénomène de vrillage phénomène qui doit obligatoirement être observé dans la partie supérieure de la voile afin que celle-ci s'adapte au gradient éolien. En effet le vent a tendance à augmenter avec l'altitude, ce qui provoque des variations de l'orientation du vent apparent. Ces changements, de direction sont accentués par la force de CORIOLIS due à la rotation de la terre sur elle-même. Le vrillage d'une voile se traduit par un changement de la valeur du volume avant avec la hauteur, particulièrement sensible sur tribord que sur bâbord où l'on observera un refus de la chute, car l'on se trouve dans l'hémisphère Nord.
 
L'angle d'incidence du voilier étant constant, le vent apparent augmente et adonne à mesure que le vent réel force.
Le vent apparent adonne et force en s'élevant dans la voile
 
Le phénomène de vrillage provoque une variation de la valeur du creux, par une modification de la forme de la chute, afin d'avoir une vitesse d'écoulement des molécules d'air identique le long des deux cotés de la chute, cela joue en quelque sorte le rôle d'une "soupape" à la survente. Cette distribution verticale permet de déterminer la position du creux maximale et donc, de la poussée vélique.
 
 
Voici en quelques pages, les principales données à connaître sur les creux ou volumes, afin de pouvoir comprendre les grandes lignes de son fonctionnement.
 
Si l'on veut modifier la position du creux, ou de profondeur, il y a possibilité d'agir sur les réglages extérieurs à la voile, tel que l'écoute, le hale-bas, le cunnigham...
 
Cependant la voile, de par sa conception (son architecture) et les matériaux utilisés présente des qualités sur lesquelles on ne peut jouer.
 
Sans foc : l'écoulement de l'air sous le 
vent de la grand-voile est turbulent, le rendement est mauvais.
Avec foc : l'écoulement de l'air sous le vent de le grand-voile est laminaire, le rendement augmente considérablement.
 
Conclusion
 
Lorsqu'on réalise une voile, on cherche à faire le profil 1e plus stable possible. Pour cela on doit porter son attention sur la forme de la chute, le creux maximum, sa position, mais une voile ne peut être polyvalente. Avant de la concevoir, le maître voilier et l'acheteur établissent un cahier des charges en fonction de ce que recherche le skipper. Il ne peut donc y avoir de compromis possible. La voile doit former un tout avec le reste du gréement si l'on veut en tirer le rendement maximum, car la symbiose avec le mât doit être parfaite puisque la voile est la continuité du mât, encore faut-il être capable d'utiliser cet ensemble. Comme le dit Bertrand CHERET : "le régleur est 50% de la voile, il doit toujours être en phase avec sa voile".
Cela demande aux régleurs certaines capacités d'observations, celles-ci ne peuvent être acquises que sur le terrain, par une longue pratique du dériveur au départ.
Cependant des études de voiles ont été effectuées pour permettre de mieux comprendre les différentes possibilités de réglages. Ainsi l'E.N.V. à partir d'études photométriques de grand voile, a retracé sur des courbes les variations des formes de la voile en fonction des différentes tensions imposées à la voile.
Cela peut d'ailleurs être le sujet d'un prochain Dossier sur l'étude des voiles.
 
 Aux faibles angles d'incidence, l'écoulement de l'air est laminaire ; l'air s'écoule régulièrement le long des deux faces de chaque voile.